Livret et mini-livres

Sylvanus et le druide Pilatorax, une histoire inventée par Annie Lesca et illustrée par Fanny Roquette, en licence libre (juin 2015 en cc-by-sa. ISBN 979-10-93905-06-8).

Couverture du livre

Couverture du livret, mise en page Fanny Roquette, juin 2015.

Deux mini-livres à imprimer ou à réécrire :

Mini-livre

Mini-livre pour les plus-jeunes, sur une maquette de Jean Imhof, RyXéo.

Sylvanus a rendez-vous avec Pilatorax.

Sylvanus a rendez-vous avec Pilatorax.

Premiers pas avec Scribus, merci à Jean Imhof de RyXéo.

Pour les latinistes...

Pour les latinistes…

SYLVANUS DÉCOUVRE LE LITTORAL GASCON

Sylvanus est arrivé depuis plusieurs jours à Burdigala ; il ne se lasse pas de circuler le long du port d'estey au gré de marées océanes qu'il découvre pour la première fois de sa vie. Le vacarme, l'agitation, les jurons, les bagarres, les histoires, les odeurs, tout le fascine.
Un jour, il entend parler d'un druide très savant qui prédit l'avenir. Il vit en ermite à des lieues de la ville, en bordure de l'océan. Est-il vraiment aussi savant que la Pythie de Delphes ? Sylvanus décide d'aller le consulter et se joint à un convoi qui va chercher saumure et résines dans la cité de Boios. Qui sait ce que l'avenir lui réserve ? Sera-t-il empereur ?

Le voilà rendu au pied de la forêt de la Bila Seuva ; pendant que les marchands chargent les lourdes dolia de la poix attendue pour calfater les galères, il grimpe vaillamment jusqu'au sommet du Truc de la Truque.
La pente est raide, il faut se frayer un chemin à travers les ronces et les orties ; l'ombre des chênes centenaires ne le protège que peu de la chaleur orageuse et des moustiques. La forêt semble déserte et il doit se fier à la course du soleil pour garder son cap à l'ouest. Seule trouvaille une corne de vache sauvage abandonnée qu'il récupère au passage. Il sifflote pour garder son allure militaire.

Arrivé au sommet, le vent de noroit et le spectacle le rendent muet de saisissement. La mer verte et la mer bleue se font face. Le voilà donc ce terrible Sinus Aquitanicus dont parlent les navigateurs ! le voilà donc ce terrible Promontoire Curian responsable de tant de naufrages de cargaisons d'étain des îles Cassitérides ! Le fracas des brisants, le coassement des mouettes et des goélands parviennent jusqu'à lui, comme autant de signaux de détresse.
Sylvanus hésite, prêt à rebrousser chemin. Superstitieux, il attend un signe et surveille la course des nuages. Quelle idée saugrenue d'aller consulter ce druide qui n'est probablement qu'un charlatan de plus ! La fierté le retient, pas question de revenir bredouille et d'affronter les sarcasmes des marchands. 

Il descend prudemment en direction de la mer et là, il découvre avec étonnement toute une série de lagunes au bord desquelles des sauniers récoltent les pains de sel et bavardent avec les pêcheurs qui tendent leurs filets à sécher. En voyant un soldat romain approcher, tous se taisent et se détournent.
Tout penaud, Sylvanus s'écarte et s'en va recueillir sur la grève les objets nécessaires au rituel des augures, une plume pour le monde aérien, une coquille d'ostrea edulis pour le monde marin, un liseron pour le monde végétal ; la corne de vache servira pour le monde animal.
Puis il cherche du regard le passeur qui doit le conduire jusqu'à l'île du Matoc. Celui-ci le hèle dans une langue gutturale qu'il a du mal à comprendre et il embarque. Méfiant et prudent, Sylvanus garde son denier : il ne le paiera qu'au retour.

C'est le cœur serré qu'il voit s'éloigner le rivage ; ni le clapotis des vagues contre la coque de la pirogue ni celui régulier des avirons n'arrivent à calmer son appréhension grandissante. Il a beau serrer son scarabée-fétiche, rien n'y fait.
Le débarcadère en bois est enfin là, il saute à terre en veillant à ne pas trébucher. Mais il dérange les autochtones et une nuée de sternes décolle bruyamment. 

Pieds nus dans les flaques, comme surgi de nulle part, mi-druide, mi-haruspice, un vieillard l'observe en silence un long moment. Puis, du bout de son baton, il trace un cercle sur le sable ; il divise le disque en quatre parties orientées selon la course du soleil.
Sylvanus comprend qu'il doit déposer dans chacun de ces quartiers une de ses offrandes : il réfléchit et pose le liseron au couchant, la plume de mouette au levant, l'huître et la corne de façon opposée, dans l'axe des pôles.
Mais le vent se lève d'un coup, soulevant un nuage de sable qui vient tout recouvrir. Alors le mage prononce son oracle terrible : 
Quand les enfants auront coupé les longs cheveux verts de leur aïeule, celle-ci ne pourra plus leur donner asile. Les lacs déborderont de pleurs, les cités seront ensevelies, les dunes deviendront chauves.